Il nous a fallu 6 jours pour faire la traversée, soit les 570 miles (env. 1000km) entre Las Perlas (Panama) et Bahia de Caraquez (aussi appelé Puerto Amistad, au nord de l’Equateur).
6 jours et toutes les conditions possibles pour la traversée entre le Panama et l’Equateur
Nous sommes partis de Isla Ampon (Las Perlas, Panama) lundi vers 10h aux sons des cloches et conche (coquillage qui peut servir de « trompette ») de nos amis de Kjaloha et de Tanoa. Le premier jour fut juste parfait : les vagues, le vent et le courant étaient avec nous, on avançait à plus de 5.5 nœuds et on a même vu deux fois des dauphins.
Le deuxième jour, je n’ai vu que le plafond du salon, j’ai eu un des pires mal de mer de notre voyage. Rien ne voulait rester dans mon ventre et mon nerf du trigeminus m’a fait énormément souffrir. Par chance Willi était en forme et il s’est occupé du bateau tout seul toute la journée.
Le troisième jour nous avions moins de vagues et le courant avec nous et j’étais de nouveau en forme.
Après le vent a baissé et même s’il revenait pour quelques heures et qu’alors nous pouvions utiliser le génois, nous avons dû faire 44h au moteur.
Le quatrième jour, nous avons fait une halte au milieu de l’océan pour nous baigner, il n’y avait pas de vent et presque pas de vagues. Comme il faisait très chaud, on a apprécié de se rafaîchir dans l’eau transparente du Pacifique.
Le cinquième soir, vers 20h nous traversons la fameuse ligne de l’Equateur et buvons un cocktail à la santé de Neptune en se faisant secouer dans tous les sens par les vagues.
Nous avions confirmé notre venue par email via satelite à Puerto Amistad et nous sommes arrivés le dimanche comme nous avions prévu vers midi devant Bahia de Caraquez. Là nous avons planté l’ancre pour attendre le pilote qui est venu nous cherchez vers 15h30. C’est-à-dire à la marée haute moins une heure. Il faut absolument respecter cet horaire car le passage jusqu’à Puerto Amistad est très étroit et peu profond et il y a beaucoup de vagues (nous avions à nouveau 18 nœuds de vent…). L’avantage d’avoir écrit un email est que le responsable du port nous a répondu et que nous sachions qu’un pilote allait venir nous chercher. Ceci était bien pratique car même si nous avons appelé la capitainerie plusieurs fois par radio (canal 69), nous n’avons jamais reçu de réponse.
Victoire
Le troisième jour Willi a réussi à installer notre ARIES (une sorte d’auto-pilote qui fonctionne avec le vent). Ce fichu appareil n’avait jamais voulu fonctionner jusqu’à présent et Willi avait passé des heures à le démonter, remonter et réinstaller des poulies pour les cordes. Cette fois on a pu l’utiliser une journée entière sans problèmes. C’est pratique car cet appareil n’a pas besoin de courant électrique contrairement à notre autopilote électrique. Le seul ennui est que nos poulies sont placées trop bas et que les cordes s’abiment très vite à cause du frottement. Mais Willi a des idées comment résoudre ce problème et on s’en occupera quand on sera en Equateur.
Quelques frayeurs pendant la traversée entre le Panama et l’Equateur
Le matin du quatrième jour Willi m’appelle comme quoi nous allons avoir de la visite. En effet un petit bateau nous suivait et s’approchait de plus en plus de nous. Cela fait une drôle d’impression quand un bateau (sans signal AIS) nous suit, qu’on est à plus de 35 miles (65 km) de la côte colombienne et qu’on sait que ce bateau est beaucoup plus rapide que nous et que l’on ne peut pas s’enfuir. Finalement ce n’était que des pêcheurs qui voulaient savoir si on avait des cigarettes.
L’après-midi du cinquième jour Willi m’appelle car le bateau n’avance plus. On regarde derrière nous et on voit 2 bouteilles rouges qui flottent. Me… on est pris dans un filet. On enroule le génois. En regardant dans l’eau on voit bien deux cordes vertes de chaque côté de vela dare. En regardant encore derrière nous on voit 4 bouteilles, deux de chaque côté donc on est vraiment dans un grand filet… On ne sait pas où on est accroché : à la quille, au gouvernail ??? Willi essaie de pousser ces cordes avec une perche mais avec les vagues et le courant il n’arrive rien à faire. On n’ose pas mettre en route le moteur par peur que le filet s’enroule autour de l’hélice… On remet un mini bout de génois et on essaie d’aller vers tribord, puis on change le génois de côté pour aller vers babord et finalement, tout à coup, on est libre. On remet prudemment le moteur en route, ouf il fonctionne normalement et le filet ne s’est pas accroché dans l’hélice.
La dernière nuit est pénible, il y a beaucoup plus de vent que ce qui avait été annoncé et surtout des vagues dans tous les sens. On a dû reprendre des médicaments contre le mal de mer. Le vent change régulièrement de sens et nous devons faire plusieurs empannages (changer de côté le génois) et un courant nous pousse vers le sud alors que nous devons aller vers l’est et nous rapporcher de la côte de l’Equateur. Finalement nous décidons de mettre le moteur pour pouvoir nous reposer un peu. J’appelle Willi pour faire le changement de quart en lui disant qu’il y a une lumière bleue devant nous à tribord (droite) mais que l’on ne voit rien ni sur l’AIS ni sur le radar. Plus tard il me dit que c’était un bateau de police qui nous a croisé. Il m’appelle en me disant que nous recevons à nouveau de la visite. Il fait encore nuit et on voit deux lumières qui clignotent et un amas de lumières qui s’approche à grande vitesse de notre voilier. Willi me dit qu’il pense que les deux lumières qui clignotent au loin devraient être des phares selon les cartes de Navionic, mais il n’est pas vraiment sur car on est encore loin de la côte. On distingue finalement à nouveau un bateau avec 3 hommes à bord qui arrivent vers nous. Ils tournent autour du bateau et hurlent des choses en espagnol et font de grands signes. On éteint notre moteur pour essayer de les comprendre. Je crois comprendre 3 mots : pesce, trabacho et tribord. On interprète leurs signes comme un appel à aller à tribord. On change donc le cap et ils continuent à nous suivre mais sans crier ni gesticuler. Willi est inquiet car on prend un cap à 90 degrés de celui que nous voulions suivre et on s’éloigne de plus en plus des lumières clignotantes… Les vagues nous secouent dans tous les sens, on décide donc de reprendre notre premier cap quand tout à coup Willi donne un coup de barre vers tribord. Il vient de voir une rangée de bouées blanches. On passe à quelques 50 cm d’un énorme filet. On va chercher le projecteur et on voit que ce filet s’étend sur plusieurs mètres. Voici donc pourquoi les 3 hommes nous on fait changer de cap. Et après, on s’éloigne des lumières clignotantes qui semblent être des marques pour les filets de pêche ici en Equateur…
Premières impressions de Bahia de Caraquez
Vous comprendrez donc sans peine qu’après ces peripéties, nous ayons beaucoup appréciée la première nuit à Bahia de Caraquez. Nous sommes à l’entrée d’une rivière et l’eau est boueuse et transporte beaucoup de débris, le bateau change de direction en fonction de la marée, on est juste à côté d’un énorme pont avec beaucoup de voitures, mais on ne se fait pas secouer comme à Vista Mar Marina.
Nous n’avions pas réalisé que nous étions juste pendant la période de carnaval et qu’il y a deux jours fériés en Equateur pour ceci. Nous devons donc attendre quelques jours avant de pouvoir faire les formalités douanières. Cela nous permet de faire de l’ordre dans le bateau et dans notre pharmacie afin de nous assurer que nous n’avons pas de médicaments périmés ni d’extincteurs hors date….